Respect des femmes et éducation des garçons
Aujourd’hui, je vais parler de respect des femmes et essayer de vous expliquer pourquoi, à mon avis, tout ne relève pas de l’éducation des garçons. Parce que je suis maman de deux garçons, féministe, je me sens quand même un peu dérangée par certaines publications sur les réseaux sociaux.
Je parle de ce genre de publication :
- « Éduquez vos garçons dans le respect des femmes pour qu’ils ne soient pas des porcs !«
- «Plutôt que d’apprendre aux filles le self-défense, apprenez à vos garçons à ne pas agresser les femmes »
- « Le problème c’est qu’on ne demande rien aux garçons ! Ils sont toujours éduqué selon une société patriarcale qui s’attèle à dire aux filles de faire attention. Mais pas aux garçons de se comporter comme des humains décents avec l’autre partie de l’humanité. »
#Metoo et #balancetonporc
Depuis quelques jours, les témoignages de harcèlements ou agressions sexuelles se multiplient sur Twitter et Facebook. Deux hashtag ont permis de libérer la parole : #metoo ou #balancetonporc.
ENFIN une prise de conscience des chiffres annoncés par les différents ministères en charge des droits des femmes. Malgré les différentes campagnes lancées auparavant, ces chiffres semblaient encore abstraits. Avec tous ces témoignages, tout le monde réalise l’ampleur des violences subies par les femmes (harcèlement sexuel, agressions sexuelles, harcèlement de rue…).

Crédit photo Topito
Victimes ou agresseurs, ça dépendrait du genre ?
Les chiffres sont là, les témoignages sont là. Les femmes subissent des agressions sexuelles et des situations de harcèlement de la part des hommes. Pas tous les hommes, comme le souligne Maman BCBG, mais pourquoi toujours incriminer l’éducation des garçons, les hormones ?
Dans de nombreux commentaires, la distinction était faite de manière assez catégorique. Les filles sont des victimes potentielles et les garçons des agresseurs en devenir. Point.
Pour certaines personnes, c’est une simple question d’hormones, de testostérone qui rendrait les garçons incapables de se contrôler face à une fille.
Ou encore, que les femmes et les hommes n’ayant pas la même « force physique » il ne pourra jamais y avoir d’égalité entre les sexes.
Petite parenthèse :
Cet argument me met aussi en colère parce qu’une différence physique n’est pas une inégalité. Oui, c’est un fait avéré : les femmes et les hommes sont différents physiquement. Certains hommes sont plus forts physiquement que les femmes mais l’inverse et vrai aussi. Il n’en demeure pas moins que les femmes et les hommes devraient être égaux en droit. Et là, on en est encore loin, très loin et il reste beaucoup de chemin à parcourir pour une égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Et cette vision des choses me dérange parce que c’est mettre de côté l’influence de la société et du monde qui nous entoure.
Ouai, mais toi, c’est pas pareil, t’as des garçons !
J’ai deux enfants et (manque de bol ?), ce sont deux garçons. Des agresseurs potentiels donc.
Selon certaines personnes, c’est à moi que revient la responsabilité de ne pas en faire des gros cons.
C’est à moi de leur apprendre à ne pas siffler une fille dans la rue, ne pas avoir de comportement déplacé avec elle. Leur apprendre le respect des femmes.
Ou encore, ne pas céder à ses pulsions sexuelles face à une jeune fille.
La bonne nouvelle, c’est que ça, je n’ai pas attendu #metoo ou #balancetonporc pour le faire.
Mes deux garçons participent depuis qu’ils sont en âge de le faire aux tâches domestiques, comme leur père et moi.
Ils connaissent mes engagements en faveur de l’égalité femmes-hommes.
C’est bien clair dans leur esprit que les femmes et les hommes ont les mêmes droits, les mêmes possibilités d’exercer un métier qui leur plaît.
Mais ils savent aussi que des rôles sociaux sont attribués aux filles et aux garçons.
Ils m’ont déjà entendue m’énerver devant des discours sexistes qui voudraient qu’en fonction du sexe d’un individu lui soient attribuées telles ou telles caractéristiques personnelles. Du genre une fille doit être douce et attentive aux autres, un garçon doit être fort et courageux.
Je sais bien que tout ne se passe pas de la même manière dans chaque famille. Chaque individu a son niveau de sensibilité au respect des droits humains, au respect des femmes. C’est en fonction de notre histoire, de notre vécu que nous transmettons ces valeurs à nos enfants.
Mais ce n’est pas en incitant les filles à devenir des guerrières que les femmes et les hommes parviendront à l’égalité. Ce n’est pas non plus en insistant sur l’éducation des garçons au respect des femmes. Parce que non, tout ne repose pas sur l’éducation que peuvent donner les parents.
Il faut apprendre aux enfants le respect des autres, l’égalité, la mixité sans distinction de genre sinon on projette nos stéréotypes
— Egalimère (@egalimere) 16 octobre 2017
L’influence de la société et des médias
L’évolution des droits des femmes est encore assez récente comparé à l’échelle de l’humanité.
Il est difficile de révolutionner un modèle patriarcal parce qu’il y a encore de nombreuses résistances de la part de la société.
J’agis auprès de mes garçons de manière quotidienne pour les éduquer dans le respect des femmes et des hommes. Ce serait un réel échec pour moi s’ils devenaient des gros cons. S’ils agressaient une femme dans la rue ou lui manquaient de respect.
Je connais bien d’autres parents, connus ou moins connus, qui font de même.
Mais nous sommes toutes et tous confronté·e·s à ce qui se passe à l’extérieur de nos foyers.
De nombreux stéréotypes persistent et sont entretenus par les images véhiculées dans la presse, les médias, la télévision.
Le sexisme est présent, partout, tous les jours. Tellement présent qu’on en arrive à parler de sexisme « ordinaire ».
Le corps des femmes est chosifié dans les publicités, dans les clips vidéos.
Le harcèlement sexuel fait grimper l’audimat et rire les auditeurs et auditrices.
Le plafond de verre et le faible taux d’accession des femmes à la tête des entreprises sont encore des réalités.
Le respect des femmes, une affaire de toutes et tous !
Malgré tous ces stéréotypes et ce sexisme qui perdure, il y a quelques avancées pour lutter contre les violences faites aux femmes.
Le gouvernement renforce les lois sur l’égalité professionnelle, les violences sexistes et sexuelles. Des campagnes de lutte contre les violences, le harcèlement de rue, dans les transports en commun… sont lancées. Des blogs se créent pour dénoncer les agissements sexistes et agressions sexuelles. Les réseaux sociaux s’enflamment de témoignages et la prise de conscience est violente, la réalité dure à entendre.
Nous apprenons à nos enfants le respect des femmes, le respect des hommes, le respect des autres.
Mais ce n’est pas suffisant. C’est donc en se mobilisant ensemble, en voulant faire bouger la société et en refusant de continuer à subir l’influence des médias que les choses pourront bouger. En arrêtant par exemple de rire quand un animateur prend la main d’une animatrice pour lui faire toucher son sexe. Ou en refusant ces images de femmes chosifiées dans la publicité, les clips vidéos.
Mais ce n’est pas en clivant les parents de filles et les parents de garçons que nous parviendrons à limiter les agissements sexistes et les violences.
Pour une fois, je ne suis pas d’accord avec vous…
Je ne pense pas que des parents (quel que soit leur rapport au féminisme) se disent qu’iels veulent que leur fils agresse, harcèle ou viole une fille ou une femme.
Mais l’ouverture de la parole via ces hashtags a un effet majeur, qui est de faire prendre conscience au plus grand nombre que, non, ce ne sont pas toujours les autres qui sont « les méchants », mais que tous les hommes et garçons que nous connaissons ont pu, un jour ou l’autre, participer (de près ou de loin) à ce système, qui fait que les femmes ont peur de rentrer seules le soir, et font attention à leur façon de s’habiller pour que ça ne soit pas « mal interprété »…
Je suis mère moi aussi, et profondément féministe. Ma plus grande peur n’est pas qu’une de mes filles soit agressée ou violée (évidemment que ça me fait peur, entendons nous bien…), mais que mon fils, un jour, agresse ou viole quelqu’un, y compris, et c’est à mon avis la grande majorité des cas, sans même s’en rendre compte.
Comment violer ou agresser sans s’en rendre compte? c’est hélas très facile… Les harceleurs, dans leur majorité, ne se voient pas comme tels, mais ils « font des compliments », ils « draguent », ils « essaient de faire connaissance ». Les violeurs ne se voient que rarement comme tels, ils ont « un peu insisté », « elle n’a pas dit non », « elle avait un peu trop bu », « elle dormait mais on est en coupe alors ça va »……
Et c’est à nous, parents de garçons, de leur expliquer l’importance du consentement, et de leur dire que non c’est non, mais aussi que ne rien dire ne veut pas dire oui…
Alors oui, j’éduquerai mon fils pour qu’il ne soit pas un de ces porcs, mais aussi mes filles pour qu’elles soient armées pour reconnaître et combattre ces porcs.
Merci Violaine.
C’est également le sens de mon article mais je n’ai sans doute pas bien réussi à l’exprimer.
(J’ai allumé mon PC) (fichue tablette)
Mes frères ont reçu la même éducation que ma sœur et moi. Mon fils recevra la même éducation que ma fille.
Mais en tant que prof, je vois bien que tout ne se joue pas dans la famille. Il y a le copain ou la copine, les influences extérieures, l’envie de faire comme l’autre…
C’est toute la société qui doit changer, les représentations que l’on a de la femme, notamment et comme il est plus facile d’éduquer un enfant correctement que de rééduquer des adultes, commençons par le commencement…
J’ai écrit un billet la semaine dernière sur ma fille qui a un amoureux. Il ne veut pas qu’elle soit son amoureuse. Hé bien elle a compris et accepté. Non, c’est non. Et ça m’a fait me demander à quel moment, dans la tête de jeunes gens et d’adulte, on n’accepte plus le non, le refus et on se croit en droit de passer outre le consentement.
En voilà une bonne question… A quel moment on n’accepte plus le refus et on se croit en droit de passer outre le consentement ? Une trop haute estime de soi ? Un déficit de gestion de la frustration ? Ça me donne envie de creuser le sujet.
J’y réfléchis depuis cette histoire.
En tout cas, j’ai félicité ma fille d’avoir accepté le refus et d’avoir respecté son choix. Je crois que c’est important aussi d’éduquer nos filles en ce sens : si elles respectent le choix de l’autre, il doit respecter leur choix aussi.
Merci pour le lien !
Ta réflexion est super intéressante, et du coup, ça (m’)ouvre des perspectives…
Effectivement, l’éducation ne fait pas tout, notre enfant se frotte tôt ou tard à la société, aux amis, aux autres membres de la famille, à la publicité, à la télévision… donc tout ne repose pas sur l’éducation (ce serait plus facile sinon)
Il faut effectivement une réponse globale.
Donc l’éducation à donner à nos enfants, fille et garçon, est importante, mais il va être nécessaire de changer beaucoup de choses pour faire évoluer la société dans le bon sens.
Tu ne parles pas de la pornographie. sans être cynique, je me doute bien que mes enfants y seront confrontés un jours ou l’autre.
La représentation des rapports homme/femme telle qu’elle est véhiculée dans ce domaine est problématique (il n’y a d’ailleurs pas que ça de problématique mais passons)
La femme dit non, le type (les types ?) insiste(nt) et elle fini par adorer ça… combien de fois on a vu ce scénario ? Quelle empreinte cela laisse sur des jeunes en constructions ?
Bref, merci d’élargir les pistes !
Je n’ai pas parlé de la sexualité dans ce billet mais j’aurai pu parce que c’est vrai que le porno donne une image qui ne correspond pas à la réalité. Je l’avais abordé dans ce billet d’ailleurs
https://egalimere.fr/2017/09/contraception-grossesse-mst-information.html
Je suis mère d’une fille et d’un fils. Je refuse de voir ma fille comme une future victime, devoir l’armer et lui apprendre à se défendre. Je refuse de voir mon fils comme un futur adresse. J’espère arriver à les éduquer l’un comme l’autre dans le respect de l’autre, de ses décisions et ses envies. Et ils participent tous les 2 à la hauteur de leurs capacités aux tâches domestiques, voire ils se battent pour les faire…
Et en ce sens, je suis d’accord avec toi: il n’y a pas que sur les parents de garçons que la responsabilité pèse, c’est sur la société entière. Il faut arrêter d’utiliser nos corps pour pouvoir vendre des produits. Il faut punir les mouvements sexistes à la télé plutôt que d’en rire. Il faut arrêter le stéréostypage des jeux…
Il reste encore tant de choses à faire… Commencer par apprendre aux enfants, filles et garçons, le respect des autres en est une mais il faut aussi que ça bouge à tous les autres niveaux.
Il me semble que l’éducation est une affaire globale (famille, école…).
Vu ton positionnement, et malgré le sexisme social, tes fils seront dans une logique égalitaire.
Malheureusement ce n’est pas le cas de tous les parents. Sans même s’en rendre compte, certains transmettent à leurs fils des comportements sexistes.
J’ai dans mon entourage des parents qui rigolent que leur fils ait plusieurs amoureuses mais qui explique à leur fille que « non, ce n’est pas possible, tu ne peux avoir qu’un seul amoureux ».
J’ai vu des amis rigoler que leur fils s’amuse avec ses copains à regarder les culottes des filles dans la cour « ho ça va, c’est juste une blague »…ils auraient trouvé ça moins drôle si leur fille avait eu le même comportement.
Il y a tous ces parents qui actuellement pestent devant la tv en voyant les infos sur Weinstein parce qu’ils trouvent que « quand même si c’était vrai, elles se seraient plaintes avant ».
et tout cela participe d’une éducation sexiste qui n’apprend pas aux garçons le respect du corps de l’autre.
Quand on élève nos enfants avec un regard égalitaire et non sexiste, je me dis que les influences des autres autour seront quand même moindre car il reste des « bases ».
Les enfants élevés dans un milieu sexiste (parfois sans même que les gens ne s’en rendent compte!) auront d’autres bases et vivront différemment les sollicitations des copains.
C’est le même principe avec les filles : la société leur renvoi une certaine image d’elle-même, mais si nous leur apprenons rapidement que c’est une construction sociale, elles sont en capacité d’appréhender leurs capacités différemment.
Pour l’anniversaire de Loulou, un copain lui a offert la BD « La bande à Lucien ». Il s’est installé pour la lire et au bout de quelques pages, il l’a refermée en me disant qu’il n’aimait pas parce qu’il trouvait ça trop sexiste. D’un côté, j’étais contente parce qu’il arrive à déceler le sexisme dans une BD. D’un autre côté, ça m’a rendue un peu triste parce qu’il passe à côté de l’insouciance de l’enfance :-/
Je dois commencer, Egalimère, par remercier les # pour m’avoir fait découvrir ton blog, que je trouve très intéressant et particulièrement constructif, notamment grâce à la variété des articles proposés.
Je comprends ton texte : tout ne se joue pas à partir de l’éducation à la maison et la plupart des familles qui transmettent des messages toxiques ou des modèles inégalitaires le font dans l’ignorance : aussi bien à leurs filles qu’à leurs fils.
(C’est parce que j’avais absorbé, enfant, un schéma dysfonctionnel que je n’ai pas pu ou su me préserver d’une relation abusive, je ne le savais pas alors, j’ai su m’en affranchir : les modèles parentaux affectent autant les enfants des deux sexes. J’aurais aussi bien pu devenir agresseur que victime.)
Pour moi, l’éducation est un principe de vie, un enseignement que l’ont doit essayer de s’imposer à soi, pour s’améliorer, et proposer aux autres par l’exemple. C’est à dire par l’action et non pas (uniquement) par des #, des paroles ou des discours.
Homme, femme, nous sommes différents et vraisemblablement à l’aube d’un rééquilibrage de nos rôles sur la Terre. Le discours actuel polarise les genres, et oublie ceux qui ne s’identifient à ni l’un ni l’autre.
Mais on ne peut pas non plus rester aveugle au fait que 80% des violences dans le couple sont infligées par des hommes à leur compagne. Difficile alors de rester dans une « neutralité » de propos…
je croyais avoir répondu à l’époque à cet article, vive les rediff de l’été !
j’ai un garçon et une fille et je les éduque évidemment de la même manière, dans le respect de l’autre et dans la nécessaire « acceptation » qu’hommes et femmes doivent avoir une place égalitaire dans la société. Cependant, je me rends compte avec mon grand que l’éducation parentale ne suffit pas, ou nécessite une attention plus poussée : l’influence des groupes de garçons à son âge (12 ans) est effroyable. Je n’ai pas le recul avec ma fille bien trop jeune et peut être que cet effet de meute sera le même et qu’il ne s’agit que d’un pendant merveilleux de l’adolescent qui se réveille, mais j’avoue me poser la question parfois de l’utilité de mon éducation à ce sujet, quand j’entends certains propos tenus par ces mini-hommes. (cela ne m’empêche pas, bien au contraire, de les reprendre et de réexpliquer encore et toujours l’importance de cette égalité !).
C’est le côté ingrat de l’éducation qu’on donne à nos enfants. On leur apprend l’égalité, le partage de tâches, et voilà qu’ils rentrent un soir en disant « le rose c’est pour les filles »… Alors oui, on répète, on répète mais au final, je suis sûre qu’on plante des petites graines autour de nous 🙂