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Lettre d’une mère à sa famille

Voici un très beau texte, la lettre d’une mère à sa famille. Il s’agit d’un outil de sensibilisation que j’ai découvert dans « Dix-sept fiches pédagogiques pour l’apprentissage de la mixité – Document réalisé par Vincent Roussel en mai 2008. Adaptation du texte de Ginette Durosiers – Lettre d’une mère »

Lettre d'une mère - dix sept fiches pédagogiques pour l'apprentissage de la mixité

Si je choisis de la partager aujourd’hui, c’est parce qu’elle amène à réfléchir sur le rôle de chacun dans l’organisation familiale. Sur l’impact de la charge du travail domestique sur l’emploi des femmes, l’importance du partage des tâches, la vision de la société et des rôles sociaux de sexe…

Voici donc la lettre d’une mère :

 » Je m’en vais.

Je reviendrai quand vous saurez où se trouvent les boules de naphtaline, quand notre maison n’aura plus de secrets pour aucun d’entre vous, quand vous serez capables de déchiffrer tous les codes des boutons de la machine à laver, quand vous saurez réprimer vos cris et vos mouvements d’humeur en trouvant le tube de dentifrice ou le rouleau de papier hygiénique vide.

Je reviendrai quand vous serez disposés à porter avec moi la couronne dorée de « la fée du logis», quand vous serez capables de vous passer de moi pour partager les tâches de la maison.

Vous me manquerez beaucoup, je le sais. C’est cependant en m’éloignant de la maison que je pourrai vraiment combler le vide laissé par l’ambiguïté des manifestations de votre affection  aujourd’hui. Je pourrai alors être sûre que vraiment vous m’aimez pour moi-même quand vous saurez  vous passer de moi pour manger ou pour vous habiller ou pour vous laver ou pour trouver une paire de ciseaux.

Je ne veux plus être une reine qui régit tout dans la maison; je suis fatiguée; je me suis fatiguée en me chargeant d’une responsabilité beaucoup trop lourde et je craque.

J’ai enfin pris conscience que si je continue à vouloir jouer à la mère parfaite et à l’épouse modèle, je ne réussirai qu’à vous communiquer une triste mentalité d’assistés. Or mon vœu le plus cher est de vous savoir libres, indépendants et autonomes.

A la maison, vous avez pris l’habitude de vous laisser  porter et maintenant je sais que ce comportement s’est installé parce que, au fil des années, j’ai voulu tout gérer ici, pensant faire preuve d’amour pour vous en vous rendant la vie facile.

Si je reste, je ne pourrai pas m’empêcher de continuer comme  avant. Je voudrai toujours être présente, toute à tous et, par la force de l’habitude, vous attendrez toujours plus de moi. Cela me paraît tellement dangereux pour vous comme pour moi. C’est un piège dont je désire de toutes mes forces que nous sortions.

Si je pars, je peux vous assurer que ce n’est pas à cause de la fatigue. Pourtant je peux vous avouer que mes nuits sont devenues mauvaises. Je ne peux jamais m’endormir sans penser aux multiples soucis domestiques, au repas du lendemain, aux achats qu’il ne faut pas oublier de faire, en vitesse, en revenant du travail, etc. A la longue j’ai acquis cette manie de repérer le moindre petit voile de poussière sur les meubles quand je m’assieds dans le canapé ; alors il me faut aller chercher le torchon, le produit anti-poussière et la cire pour nettoyer. Non, la fatigue accumulée n’est pas la raison principale de mon départ.

Je ne m’en vais pas non plus parce que je veux être libre pour faire une belle carrière dans ma Profession. Il y a déjà bien longtemps que j’ai choisi de mettre entre parenthèse toute ambition dans ce domaine et de travailler en intérim, parce qu’il  ne m’était pas possible d’avoir en même temps, une plus grande disponibilité de temps et d’esprit dans mon travail et le souci de ne rien négliger dans l’entretien de la maison, le soin et 1’attention à mes chers enfants.

Aujourd’hui, je souhaiterais partager avec vous la prise en charge de la maison et, si je pars, c’est d’abord pour savoir si je suis capable d’apprendre à déléguer aux autres membres de mon cher foyer les responsabilités des diverses tâches. Je le souhaite vivement parce si cela se réalise, jamais plus je ne me sentirai coupable quand mes enfants ne reviendront pas de l’école avec de bonnes notes ou quand les lentilles brûleront pendant la cuisson ou quand quelqu’un n’aura pas de chemise bien repassée à mettre pour une sortie.

Si je me suis rendue indispensable à la maison, c’est bien de ma propre faute et si je disparais pendant un certain nombre de jours, vous pourrez vous rendre compte qu’il est relativement facile de transformer une monarchie domestique en une démocratie participative. Et peut-être que, quand je reviendrai, j’aurai acquis suffisamment d’humilité pour accepter la simple place d’une citoyenne de base n’ayant ni plus ni moins de droits et de responsabilités que les autres.

Quand donc vous saurez trouver les boules de naphtaline et que la maison n’aura plus de secrets pour vous, vous m’en informerez. ll est certain alors que moi aussi j’aurai appris à ne plus être trop bonne à tout faire.

Ce jour-là nous aurons appris non pas à nous aimer plus mais à nous aimer mieux.

Tendres baisers,

Maman  »

 

Source : Dix-sept fiches pédagogiques pour l’apprentissage de la mixité – Document réalisé par Vincent Roussel en mai 2008. Adaptation du texte de Ginette Durosiers – Lettre d’une mère

Égalimère

Working-mum, pro de l'équilibre vie pro-vie perso, qui culpabilise, râle contre les stéréotypes & les inégalités, aime la vie, les sorties et les voyages.

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