Fleurus, la collection P’tite Fille, P’tit garçon
Lorsque la liste des marques présentes aux Efluent5 a été divulguée, j’ai rapidement été interpellée par des messages du type : « Eh, tu as vu, il y aura Fleurus, tu vas aller les voir ? ». Bien sûr que j’avais prévu d’aller les voir ! C’était l’occasion ou jamais d’aller échanger sur leur collection P’tite Fille et P’tit Garçon qui véhicule tant de stéréotypes.
Le sexisme dans la littérature jeunesse
Vous vous souvenez de l’article « Lutter contre les stéréotypes » ? Oui, celui dans lequel j’explique de quelle manière, depuis bien avant la naissance de notre enfant, nous lui attribuons un rôle social en fonction de son sexe. Comment les stéréotypes sont tellement ancrés dans nos esprits que nous continuons malgré nous à les reproduire. Pourtant, même si nous essayons de faire attention au quotidien, nous sommes rapidement dépassés par les stéréotypes. Ils sont partout ! Dans les magasins de vêtements ou de jouets, dans la presse, à la télévision…
Et la littérature jeunesse n’est hélas pas épargnée ! En effet, de nombreux éditeurs proposent des collections « pour les filles » et « pour les garçons ». Et je vous laisse deviner ce qu’on trouve d’un côté et de l’autre… De l’action, de l’aventure, des découvertes, des sciences pour les garçons. Pour les filles : du rose bonbon, des bijoux, des conseils pour bien choisir ses vêtements et accessoires de beauté…
Si vous ne les avez pas encore lu, je vous conseille ces articles sur le sujet rédigés par Fille d’Album et Toutalégo.
Pour en revenir à Fleurus, les collections P’tites filles et P’tits garçons ont souvent été épinglées parce qu’elles véhiculent des images sexistes. La collection P’tite Fille affiche une couverture rose et des titres évocateurs : Chloé joue à faire le ménage, Ninon joue à la secrétaire. La collection P’tit garçon affiche quant à elle une couverture bleue et les personnages sont dans l’action, pilotent des engins.
Même quand une figure féminine apparaît dans la collection P’tit garçon, elle est souvent passive (assiste à côté du conducteur, en train de regarder le héros de l’histoire…).
Bref, vous l’aurez compris, cette collection de Fleurus n’est pas mon amie 🙂
Ma rencontre avec Fleurus
J’étais curieuse de connaître la version de Fleurus sur ces collections. Je n’y allais pas pour « rentrer dans le lard » mais pour avoir un échange avec la représentante. Parce que oui, cette personne n’est pas responsable de ce qui est publié par sa maison d’édition alors inutile d’être vindicative tout de suite.
J’ai été très bien accueillie sur le stand. Je pense que mon interlocutrice devait s’attendre à ce que le sujet soit abordé lors de cette journée. Lorsque j’ai abordé les images véhiculées dans ces petits livres, elle a tenu à me parler de l’esprit Fleurus.
L’histoire de cette collection Fleurus
C’est parce qu’elle est maman d’une petite fille qui jouait à la dînette, à la maîtresse… que l’éditrice a eu envie de lancer cette collection P’tite Fille. Elle a donc fait appel à sa meilleure amie pour créer des personnages et leur permettre de raconter une courte histoire.
La collection a rapidement rencontré du succès et s’est enrichie de nouvelles histoires.
C’est après avoir eu un fils que l’éditrice a pensé à concevoir la collection P’tit Garçon.
Pour mon interlocutrice, les personnes travaillant sur ces collections ont été peinées d’être taxées de sexistes. Pour elles, c’était avant tout un projet familial qui prenait vie, que cela représentait beaucoup de travail. Elles se basaient sur leur quotidien de parents et des activités réalisées par leurs enfants. Je me suis abstenue de lui proposer de faire lire mon article ci-dessus mentionné 😉
Je lui ai donc indiqué que ce qui me gênait malgré tout, ce sont les images véhiculées par ces collections qui contribuent à renforcer les stéréotypes. Que cela enferme les enfants dans des rôles en fonction de leur genre au lieu de leur proposer d’en sortir.
Du changement chez Fleurus ?
Au travers de notre échange, j’ai aussi compris que ces collections avaient un réel succès auprès des familles.
Comment faire bouger les choses alors même que ce sont les parents qui achètent ces livres pour leurs enfants ?
C’est la loi du marketing : un produit est bien vendu alors la maison d’édition continue d’alimenter la collection. Mais à aucun moment dans ces ouvrages, les rôles changent. Les filles sont toujours passives, dans des activités tournées autours du soin, de la beauté, du ménage… Et les garçons pilotent maintenant des engins spatiaux !
J’entends bien cet argument marketing et je comprends que les lignes éditoriales soient difficiles à faire bouger. J’ai donc demandé s’il était possible, dans ces collections, d’avoir des personnages féminins qui ne soient plus passifs mais prennent part à l’action ? Si on ne pouvait pas voir des petits garçons en train de faire le ménage et des filles qui conduisent ?
Il semblerait qu’un peu de changement soit en train de s’opérer. Je n’en sais pas plus mais j’espère que les différent.e.s personnes qui ont contribué à pointer le sexisme de cette collection auront permis d’aller vers l’introduction de personnages féminins et masculins moins stéréotypés.
Toutefois, pour conclure, mon interlocutrice m’a rappelée que Fleurus, ce n’est pas seulement cette collection mais bien d’autres. Elle m’a donné l’exemple de ce livre dans lequel les filles jouent au foot :
Je n’ai pas eu l’occasion de le lire alors je suis bien incapable de vous en décrire le contenu et les idées véhiculées. Je n’ai pas non plus pu consulter les différents livres de cette collection « Bravo la Famille » pour savoir quels rôles sont attribués à chacun. Est-ce que la mère travaille ? Le père participe-t-il aux tâches ménagères ? Est-ce que les garçons peuvent s’occuper des autres ? Je suis bien curieuse de le savoir !
Bilan de ma rencontre avec Fleurus
Mitigé ! Il me semble que la collection P’tite Fille et P’tit Garçon a encore de beaux jours devant elle. Si les parents achètent ces livres, l’éditeur n’a aucune raison de les retirer de son catalogue.
Pourtant, il ne suffirait de pas grand chose pour que cette collection évolue un peu :
- montrer les petites filles et les petits garçons exerçant les mêmes activités,
- arrêter de montrer des filles passives face aux garçons,
- s’assurer que filles et garçons soient autant représentés l’un que l’autre, quelque soit la collection,
- élargir les activités des filles à des professions scientifiques, numériques, informatiques
- montrer des garçons prenant soin des autres personnes ou d’animaux
La liste est encore longue tellement ces livres sont bourrés de stéréotypes…
Donc, j’attends les nouveautés annoncées pour me faire une idée et ne manquerai pas de vous en faire un retour.
Si vous les avez déjà lus, je serais bien intéressée par votre retour alors n’hésitez pas à laisser votre avis en commentaire !
Oui Fleurus n’est pas la maison d’éditions la plus moderne par contre ce sont eux qui publient le plus de documentaires. Ma fille laisse petit à petit tomber les albums pour les livres documentaires et en librairie 75% de l’offre dans ce domaine c’est Fleurus. Et généralement c’est pas mal fait, bien adapté à chaque âge …
J’avoue, je ne connais pas bien les autres publications de Fleurus Presse. J’espère que ces dernières renferment moins de stéréotypes et que les images représentant les filles et les garçons sont moins sexiste que cette collection P’tite Fille
Je refuse d’acheter ces livres. Et pourtant mon aînée me les a déjà demandé. Ma fille est un cliché ambulant et elle a tout de suite été attirée par le rose du livre…et je crois qu’il y en a un sur les princesses (sans doute pour qu’elle me l’ai demandé). Mais j’ai dit non. pas que je dise non à tous les livres de princesses…mais je dis non à cette collection globalement.
ça n’empêche pas ma fille de jouer à la maîtresse, à la princesse et de porter mes talons hauts. C’est son envie pourquoi pas…ça l’empêche juste de penser qu’elle doit le faire parce qu’elle est une fille.
Comme je l’avais dit dans l’article « Quel est le problème avec le rose et le bleu », je n’ai rien contre les couleurs mais contre les images et les idées qu’elles véhiculent. Laissons les enfants jouer à ce qu’ils veulent mais arrêtons de vouloir les enfermer dans des rôles parce qu’ils sont filles ou garçons 🙂
Bonjour. Je possède à la maison un paquet de ces livres «P’tit garcon» et à l’arrivée de mon troisième enfant j’etoffe encore la bibliothèque avec car je les trouve particulièrement bien fait et adaptés différents âges. La collection «Petite fille» reste qd a elle sur les rayonnages du magasin car sans intérêt à mes yeux les textes sont moins bons et les illustrations bcp moins belles. Je partage à 300% la position et le travail de lutte contre les stereotypes et pour ma part à mon échelle il s’agit par exemple.de reprendre la lecture en demandant à mon fils «tiens et si c’était une petite fille qui conduit?» espérant toujours un «bah n’importe c’est pareil» spontané….
Pour mon plus grand (5ans) c’est malheureusement déjà trop tard car dans le genre spontané les phrases que j’entend sont plutôt du style «rose c’est pour les.filles» alors je livre un combat quasi quotidien pour lui faire entendre que NON et je cherche le plus souvent possible à le lui faire remarquer dans la vie quotidienne. Je pense malheureusement que nous sommes tellement loin de tout ca pour bcp d’autres cellules familiales et que les interactions à.l’école.sont.empreintes de ce «sexisme». J’espère qu’un jour dans une de.ces réflexions et interventions c’est mon.fils.qui évoquera l’égalité à ses camarades de classe
Coucou ! Je suis justement en train d’écrire une review sur un livre édité par Fleurus et je n’ai pas pu m’empêcher d’évoquer dans mon article, cette horrible collection. Je te félicite pour ton approche avec le personnel de Fleurus et pour les idées que tu as soumises.
Merci pour ton commentaire.
Fleurus joue peut-être dans les stéréotypes mais personnellement j’ai une fille de 9 mois et je lui ai déjà acheté des livres de la collection P’tit garçon. Cela ne me dérange pas non plus de l’habiller en garçon… pour l’instant elle est trop jeune mais c’est à nous, parents, de discuter avec eux de ces sujets et la collection est peut-être aussi un bon point de départ. Il ne faut pas voir le mal partout. Il suffit de montrer à nos enfants un peu de tout.
Je suis moi aussi outrée par la Maison d’édition Fleurus.
Je ne vais pas revenir sur la collection Ptite fille/Pti garçon, c’est déjà un cliché rien qu’au nom.
Mais j’ai récupéré tout un tas de livre de cette maison d’édition, et dans le livre « Imagier du Ciel », qui est pourtant très intéressant, y’a un énorme cliché et s’ils s’en rendent pas compte, c’est que eux-même sont très atteints.
On parle des nuages et il est dit :
On diait des grosses boules de coton, mais ils sont en fait constitués de vapeur d’eau, comme celle qui sort de la cocotte-minute quand ta maman cuisine ».
…
Berk. J’ai bégayé et j’ai changé le texte à la lecture.
En plus à la maison c’est papa qui cuisine !
m en suis servi à l ecole pour debattre sur les filles et les garçons sont ils egaux ?
effaréé en découvrant cette collection, mais surtout le titre Chloé joue a faire le ménage….quand Léon, lui conduit un camion de pompier!
Le sexisme ordinaire a de beaux jours devant lui
ANNE C Prof des ecoles qui a 3 enfants 2 filles et 1 garçon