Je suis timide et cela ne date pas d’hier. Depuis mes années de collèges et lycées, prendre la parole en public releve d’un exploit. Je me souviens de cette envie de disparaître au fond d’un trou lorsque l’enseignant laissait courir son doigt sur la liste des élèves avant d’annoncer le nom de celui ou celle qui irait au tableau. Je connaissais mes leçons (j’étais plutôt bonne élève) mais, paralysée par la peur et le regard des autres, je perdais mes moyens. Je bafouillais les 5 premières minutes, mes joues rougissaient au premier mot qui sortait de ma bouche, je tremblais et mon ventre se tordait.
Heureusement, au fil du temps, j’ai appris quelques petites astuces et suivi des conseils qui m’ont permis de prendre confiance en moi et oser me lancer en public !
Prendre la parole en public grâce au théâtre
Sur les conseils de mon professeur principal de 3ème, je me suis inscrite dans la troupe de théâtre du collège. Cette troupe donnait deux représentations en fin d’année pour financer un voyage scolaire. Je me suis vite prise au jeu. J’ai adoré apprendre les répliques du Docteur Knock de Jules Romain, les répétitions avec mes copains et mes copines, l’excitation qui monte au fur et à mesure que la date approche. Le soir de la première représentation, le metteur en scène nous a proposé des exercices de relaxation basés sur la respiration abdominale. Lorsqu’il a fallu se lancer sur scène, j’étais morte de trouille. Comment moi, la timide, allais-je réussir à parler devant toutes ces familles ? J’ai respiré profondément et je me suis lancée. Les premières minutes, mes paroles n’ont pas dû être compréhensibles mais plus nous avancions dans la pièce, plus je gagnais en confiance, plus j’étais prise dans le jeu. Le public n’existait plus, j’étais en face des autres personnages et ces moments étaient magiques. J’avais enfin l’impression de sortir de ma coquille !
Prendre la parole en public grâce à son activité professionnelle
Je n’ai pas renouvelé cette expérience théâtrale par manque de temps. J’ai poursuivi mes études, obtenu mon diplôme et me suis lancée dans la vie active. Après des débuts professionnels dans des postes qui ne correspondaient pas à mes études (pigiste dans une agence de publicité, vendeuse de porte de placards coulissantes pour une enseigne de bricolage, hôtesse de crédit pour un cuisiniste, assistante administrative pour différentes sociétés, opératrice de saisie pour l’ex-ANPE…) mais qui me permettaient de vivre, j’ai enfin trouvé l’emploi tant espéré !
Mon travail consistait à accompagner les personnes dans leurs démarches de recherche d’emploi ou d’élaboration de projet professionnel. Je suis formée aux techniques d’entretien individuel, à la reformulation des idées et l’écoute et l’empathie sont les maîtres-mots de mes accompagnements.
Pendant quelques années, je n’ai reçu les personnes qu’en entretiens individuels. Et puis un jour, au retour de mon premier congé maternité, je prends connaissance de mon planning et découvre « Groupe Objectif Projet Cadres ». Ah, ah, ah, cette bonne blague, un groupe, de cadres en plus ! J’étais plus habituée aux bas niveaux de qualifications et agents de maîtrise qu’au public cadre qu’on m’avait présenté comme très exigeant sur la qualité de l’intervention. Pour un retour en fanfare, c’était un retour en fanfare. Mais bon, je connais le boulot, je sais faire immerger les projets, je connais les techniques de recherche d’emploi, je suis donc capable de… Oui, en théorie, capable de… Mais en pratique, on ne s’improvise pas formatrice. Sans un minimum de connaissance sur la gestion d’un groupe de travail, on court à la catastrophe !
J’ai vite ressorti mes livres de Piaget sur la dynamique des groupes restreints, j’ai potassé les documents mis à ma disposition sur l’animation de groupe, j’ai échangé avec mes collègues…
Premier jour avec le groupe, j’ai mal dormi, je suis stressée, angoissée… Malgré tout ce que j’ai lu, je ne me sens pas prête et pourtant, il faut bien que je me lance. Lorsque j’arrive dans la salle, 15 personnes sont déjà là et fixent leur attention sur moi. Je repense aux exercices de respiration abdominale et je me lance. Je me rends compte que les personnes en face de moi sont toutes bienveillantes. Elles sont ici dans un seul et même objectif : élaborer un projet professionnel et trouver des solutions leur permettant de retrouver un emploi.
J’ai passé 3 mois avec ce groupe à raison d’un regroupement une fois par semaine. Si je vous dis que j’ai pleuré lorsque j’ai dû leur dire au-revoir tant ce groupe a été porteur et m’a permis de faire mes premières armes dans l’animation collective vous me croyez ? Et pourtant, c’est vrai. J’ai ainsi continué à accompagner des groupes de 12 à 15 personnes en ayant acquis un savoir-faire sur le terrain.
Prendre la parole en public devant 50 personnes
Maintenant que ce premier cap était franchi, j’avais davantage confiance en moi. J’ai pu poursuivre mon apprentissage de la prise de parole en public en participant à des colloques, séminaires, groupes de travail.
Et puis un jour, j’assistais à un grand rendez-vous qui devait réunir plus de 50 personnes. L’intervenant prévient que la personne qui devait prendre la parole aura un peu de retard et commence à meubler tant bien que mal. D’un coup, il me fixe, s’approche de moi et m’interroge : « Mais alors, nous allons profiter de ce temps pour que vous nous présentiez votre structure et ce que vous y faites ! » et hop, il me donne le micro. Je me lève, me tourne et me trouve face à toutes ces personnes qui me fixent… Je prends la parole, je balbutie, je bafouille, je cherche mes mots, j’ai l’impression que mon discours est décousu… Lorsque je termine ma présentation, tout le monde applaudit et l’intervenant me remercie pour ces explications très claires de notre activité.
J’ai donc senti que la prise de parole en public ne s’improvise pas. Même lorsque je ne suis pas sensée intervenir, quelqu’un peut me donner la parole (me « forcer » à la prendre 🙂 ). Il me manquait donc quelque chose, des bases, des conseils, une méthodologie.
Se former à la prise de parole en public
Comme je savais qu’il me manquait quelque chose dans mes prises de parole, que je stressais, que j’avais peur de perdre mes moyens… J’ai demandé à mon employeur de m’inscrire à une formation « Prendre la parole en public ». Malheureusement, les formations étaient toutes complètes mais j’ai pu bénéficier de ce qu’on appelle le E-learning (formation à distance).
Cette formation m’a appris que non, une intervention en public ne s’improvise pas, elle se prépare. Pour appuyer sa prise de parole, il est possible de projeter sur écrans des diapositives PowerPoint. Cela peut donner un côté réconfortant car il s’agit d’un support pour l’intervention (attention, on ne lit pas le PowerPoint, on le commente !).
J’ai donc eu tout un tas de cours méthodologiques sur la manière de préparer son intervention, de s’organiser le jour J, de trouver des moyens de réduire le stress… Est-ce que je me sens à l’aise pour autant ? Non ! J’ai toujours une boule dans le ventre la veille de mon intervention, j’ai toujours peur d’oublier des choses, de ne plus me rappeler de ma présentation, de bafouiller… Bref, je ne suis pas sereine…
Prendre la parole devant 100 personnes ou plus
Mon dernier challenge a donc consisté à prendre la parole devant une salle pouvant contenir 100 personnes. Je n’ai pas cherché à connaître le nombre exact de personnes assistant à ma présentation, je ne voulais pas me rajouter du stress en plus.
J’avais préparé cette intervention depuis quelques semaines. J’avais noté sur une feuille le déroulé de cette dernière, les éléments clés à mentionner. Un Powerpoint me permettrait de ne pas perdre le fil et tout était bien calé. Seulement voilà, 100 personnes en face de soi, ce n’est pas habituel (pour moi en tous cas). Alors il y a toujours ce moment d’angoisse qui me prend quand je monte sur l’estrade et que je dois commencer à parler. Il y a toujours ce démarrage qui est difficile mais rien n’est impossible !
Lors de cette dernière prise de parole en public, j’étais seule face aux participant-e-s, sur une estrade. J’ai commencé mon intervention en fixant 2 ou 3 personnes placées à différents coins de la salle de manière à focaliser mon attention sur ces dernières. Petit à petit, j’ai pu regarder les autres personnes puis la salle entière. La confiance m’a gagnée. Je sentais que les personnes étaient attentives à mes paroles alors petit à petit, je me suis relâchée. Je me suis sentie plus à l’aise. Mon discours m’a semblé plus fluide, mon débit plus lent et plus assuré. A la fin de l’intervention, je me sentais vraiment bien, à tel point qu’il m’a semblé avoir retrouvé cette impression de sortir de ma coquille. Et cela m’a fait un bien fou !
Ce qui m’aide à prendre la parole en public
La préparation est essentielle. Il ne s’agit pas d’apprendre par cœur le contenu de son intervention parce que, généralement, lorsque vous intervenez, c’est sur un sujet que vous connaissez bien, voire que vous maîtrisez. Ce qui m’aide donc, c’est ce fil rouge que je laisse à côté de moi, cette feuille de route en quelque sorte qui me guide étape par étape.
Je pense aussi à respirer et avant de parler, je pose mes pieds bien à plat sur le sol, je prends une posture assurée, épaule en arrière pour augmenter le volume d’air dans ma cage thoracique. Cela n’a l’air de rien mais la respiration est essentielle quand on parle.
Lorsque je dois intervenir, si je regarde la salle, toute la salle, tous les gens… je bloque et je n’ose pas me lancer. Alors j’ai retenu ce conseil : chercher du regard une personne qui semble bienveillante et souriante, la fixer et commencer à parler en s’adressant à elle. Cela confère un côté plus rassurant et souvent, dans ces cas là, la personne en face est réceptive et opine de la tête quand elle est d’accord avec votre discours.
Se faire confiance. Oui, facile à dire, mais si on part en se disant qu’on ne va pas réussir à parler, il y a de fortes chances pour que cela arrive. Si on part confiant.e (je connais mon sujet, les gens sont bienveillants), cela n’empêche pas de bafouiller au départ mais cela diminue une partie du stress.
Se rappeler que les gens sont bienveillants ! Ils sont là pour vous écouter, pas pour vous juger…
Et enfin, OSER !
La prochaine étape ?
Continuer à intervenir devant une assemblée de manière à me sentir de plus en plus à l’aise. J’ai échangé avec différentes personnes qui ont l’habitude de ces interventions en public et elles sont toutes unanimes : c’est en pratiquant qu’on apprend ! Certaines se font aider avec des coachs (profs de théâtre, de chant, coachs comportementaux…), de la sophrologie, du yoga… L’une d’entre-elles m’a même avoué avoir recours à des bêtabloquants tellement ces situations la stressent. A chacun-e ses petits moyens pour se sentir en confiance et oser prendre la parole en public.
L’autre point de progrès pour moi : la caméra ! Non pas que j’envisage de changer de métier et me reconvertir dans le cinéma mais il m’est déjà arrivé d’avoir à participer à des interviews filmées. Ce n’est jamais facile de se comporter de manière naturelle face à une caméra (pour moi en tous cas) alors je vais me faire violence, me lancer de nouveaux défis et me fixer ce prochain objectif !
Et vous, vous avez déjà pris la parole en public ? Dans quelles circonstances ? Comment ça s’est passé ? Quels sont vos conseils ?