Roule galette, représentations et stéréotypes
Je ne savais pas trop où me mènerait ce thème « Roule Galette » pour le premier rendez-vous #10dumois de 2018. Au départ, cela m’a fait penser à notre incident sur la route l’an dernier et cette galette qui a sauvé nos vacances. De quoi je parle ? C’est à lire ou relire ICI. Mais bon, je n’allais pas revenir sur cette incroyable aventure. Et puis je me suis souvenue d’une comptine que Ti’Loulou avait apprise au CP « Roule Galette » justement. J’avais un vague souvenir de l’histoire de cette galette qui roule, qui roule (et qui n’amasse pas mousse ). Alors j’ai fait appel à mon ami le moteur de recherche et j’ai pu relire le texte. Et découvrir les illustrations… Voilà donc où m’a menée ce thème !
Un regard nouveau sur Roule Galette
Je sais que cette comptine est beaucoup utilisée dans les écoles. Je n’avais pas souvenir des rôles attribués au vieux et à la vielle dans cette histoire. Mais quand j’ai lu le texte et vu les illustrations, ça m’a sauté aux yeux : en avant les stéréotypes !!!
Alors, plutôt que de faire un simple « GRRRRR », je vais vous inviter à jouer avec moi. Pour ce faire, je vous propose de reprendre ce qui est proposé sur le site Genrimages pour analyser les représentations sexuées et stéréotypées dans les images. Pour chaque illustration, posez-vous les questions : quelles valeurs, caractéristiques, rôles, sont mis en avant pour l’un et l’autre sexe ?
Sans même vous faire part de mes observations, vous pourrez vous rendre compte qu’il y a un traitement différent entre les rôles attribués au vieux et à la vieille.
Allez, j’ai envie de me faire plaisir pour ce premier rendez-vous de l’année. Alors je vais grossir les traits et vous livrer une interprétation bien personnelle de Roule Galette !
Roule Galette par Egalimère
C’est l’histoire d’un vieux, bien installé dans son fauteuil moelleux avec son journal et ses chaussons. Il fume la pipe et se détend, la tête appuyée sur un coussin.
A ses côtés, une vieille, assise sur une chaise en bois. Dans sa main, elle tient ce qui semble être un chiffon.
D’un coup, le vieux a un petit creux.
Ben oui, lire dans son fauteuil en fumant la pipe, ça donne faim. Alors il dit à la vieille « Et dis donc, la vieille, j’ai faim et je mangerai bien une galette là, maintenant…« . La vieille est bien embêtée parce qu’elle n’a pas de farine sous la main. Bah oui, entre le ménage, le linge à laver, à étendre, à repasser, elle n’a pas pensé à aller chercher de la farine.
Mais le vieux lui dit « Non mais j’ai faim moi ! Je veux de la galette. Alors tu vas monter au grenier, balayer le plancher et tu trouveras sûrement des grains de blé« .
Balayer, astiquer, casa toujours pimpante…
La vieille monte au grenier, balaie, trouve des grains de blés et les ramasse (mais que fait Gordon Ramsey ???).
Avec les grains de blé, elle fait de la farine. Avec la farine, elle fait une galette et la met à cuire dans le four. L’histoire ne dit pas qui est allé cherché le bois pour alimenter le four. Mais vu le dos courbé de la vieille, on peut penser qu’elle se tape toutes les corvées de la maison. Je dis ça, je dis rien…
Elle a bien bossé la vieille et comme elle est bien contente du résultat, elle va montrer la galette à son affamé de mari. Mari qui n’a pas bougé de son fauteuil pendant qu’elle allait balayer le grenier, ramasser les grains, les moudre, préparer la galette…
Et là, qu’est-ce qu’il dit le vieux ?
Tu crois qu’il dirait « Merci ma chérie, elle a l’air délicieuse ta galette… ». Non ! Le vieux qui n’a rien foutu trouve juste le moyen de faire chier la pauvre vieille parce que sa putain de galette, elle est trop chaude ! Il a de la chance qu’elle soit gentille la vieille parce que la galette aurait pu lui servir de couvre chef avec d’autres personnes…
La vieille va donc poser la galette sur le rebord de la fenêtre pour la faire refroidir. C’est à ce moment là que la galette décide de se faire la malle et d’aller rouler sa bosse sur les chemins.
Bon, la galette après avoir roulé, chanté, roulé, chanté… fini par se faire bouffer. Non pas par le vieux qui doit mourir de faim à ce moment de l’histoire mais par un renard. Sont toujours futés les renards dans les histoires vous avez remarqué ?
Donc en gros, voilà l’histoire de roule galette qu’on continue à apprendre aux enfants ?
Comme vous l’avez compris, j’ai grossi volontairement les traits. Mon objectif est de vous montrer comment des images et des textes comme ceux de cette comptine pour enfant peuvent véhiculer des représentations sexuées et des stéréotypes.
Vous pouvez vous-même réaliser vos propres analyses de ces images. C’est un exercice que vous pouvez faire en famille. Vous verrez que les visons des un·e·s et des autres ne sont pas toujours identiques. Et c’est ce qui est intéressant avec ce genre de questionnement. Cela interroge nos propres représentations et permet de bousculer les stéréotypes.
D’ailleurs, je suis curieuse de lire vos réponses alors n’hésites pas à laisser un commentaire 🙂
Et maintenant, qu’est ce que ce thème Roule Galette a inspiré aux participant·e·s de ce rendez-vous ?
Pour le savoir, cliquez sur les liens ci-dessous
C’est finalement le cas de la plupart des « vieilles comptines » et des vieilles histoires….les cendrillon, Blanche-neige, et compagnies sont bourrés de stéréotypes!
Il n’y a que dans la littérature enfantine récente que l’on voit des pères s’occuper de leurs enfants, faire à manger et des mères travailler à l’extérieur de la maison (pour faire autre chose que le champ)
C’est vrai que certaines éditions sont plus créatives que d’autres dans ce domaine. J’aime particulièrement les Editions Talents Hauts : http://www.talentshauts.fr/38-livres-et-egaux
Crapaud l’a étudié aussi l’an passé en CP mais que l partie à partir de quand la galette se fait la malle donc je connaissais pas ce qui précède… m’enfin dans le meme genre il racontait que mon mari avait malencontreusement aspiré un de ses minions pendant les vacances et qu’on avait dû éventré le sav de l’aspi en mode archéologie tout ça et son pote lui répond tu mens c’est les mamans qui passent l’aspirateur… j’ai cru que j’allais pleuré quand Crapaud a répondu bah non mon papa il a pas de copine donc il passe l’aspi aussi et meme moi je passe l’aspi parce que j’adore ça… le pote était outré ; je crois c’est plus son copain depuis
Les stéréotypes des cours de récréation… Punaise, il y a du boulot à faire dans les écoles pour sensibiliser tous les enfants (et les parents aussi…)
Un conte stéréotypé ?
Nan ?
Tu as omis un détail important : en fait le vieux il n’a plus l’usage de ses jambes, c’est pour cela qu’il est dans ce fauteuil. et son immobilité l’a aigri, c’est pour cela qu’il n’est pas aimble : il est frustré de ne pas pouvoir aider la vieille !
Attention : vieux et vieille ne sont pas des termes politiquement corrects
J’ai pensé à cette hypothèse en rédigeant mon article 🙂
Et ben moi j’aime bien roule-galette, parce que ce sont un vieux et une vieille, pas un couple jeune. Ca m’a permis de discuter avec mes garçons de la différence entre « avant », genre y’a trèèès longtemps ( ils sont vraiment vieux du point de vue de 2 enfants de 4 et 7 ans 😉 ) et maintenant, et que c’est mieux quand tout le monde cuisine ensemble, c’est plus rigolo 😀
Ca permet aussi de leur apprendre à relativiser ce qu’on lit dans des histoires écrites il y a longtemps et les histoires récentes, et ils décryptent les stéréotypes d’eux mêmes. « mais pourquoi elle attend le prince elle, elle peut pas partir toute seule ? » (véridique). Je me régale 😀
C’est une très bonne idée de l’utiliser comme ça, de pouvoir comparer le avant et maintenant, de faire réagir les enfants, les laisser cogiter…
Pas faux.
Fleur m’a fait la même réflexion récemment : « mais pourquoi c’est toujours les garçons qui vont à la guerre, ils croient que les filles peuvent pas se battre? » et effectivement c’est un bon moment pour rappeler qu’il y a eu une époque où on considérait que les filles devaient s’occuper des enfants et de la maison pendant que les garçons allaient à la guerre. Et ce décalage dans le temps/ les générations permet de dire « et aujourd’hui on fait différemment »
C’est tout à fait ça 🙂
Bonjour,
C’est rigolo, je parle aussi de ce livre mais pas pour l’histoire mais pour l’objet… il est le bon exemple de la transmission de mes livres à ma fille.
Je le lisais hier soir à ma fille, et je me suis posée les mêmes questions, mais moins poussée.
Merci pour cette nouvelle lecture.
Belle journée.
Avec plaisir 🙂 Et je file lire ton article
Bon, tu connais mon avis puisque tu es passée lire mon billet ! Pour un peu on avait le même (j’ai hésité à développer le sujet)!
Le livre date de 1956… Il a plus de 50 ans ! Quand je l’ai lu à Bichette, j’ai critiqué à voix haute : il pourrait aller balayer pour aider sa femmes ! Et il pourrait dire s’il te plait et merci. Je trouve qu’on peut tout lire avec les enfants car notre lecture d’adulte permet de commenter.
A l’école, je crois que la maîtresse ne lit que la partie où la galette roule et bat la campagne.
Finalement, c’est aussi un bon outil dans sa version de 1956 puisque cela permet de voir la manière dont les choses ont évolué dans certaines familles, d’en parler avec les enfants, d’aborder les questions d’égalité et du partage des tâches.
Mon 3 ans l’a vu à l’école et la maîtresse nous l’a même envoyé en mp3…. j’ai entendu et là, évidemment : stupeur et tremblement !
Je l’avais téléchargé et on l’écoute régulièrement dans la voiture parce que Junior adore la petite chanson de la galette. Et je trouve finalement instructif de mettre en exergue le côté déplacé des échanges des deux vieux pour mon aîné de presque 12 ans.
Du coup j’ai pris le parti de faire ma voix off automatique sur le début de l’histoire… en mode mi-humoristique mi-réaction si l’on s’avisait de me la faire ainsi, on sent efficacement le côté hyper sexiste et décalé de cette histoire.
Mon aîné m’a d’ailleurs demandé : mais, quelle est la morale de l’histoire? Il y en a une au moins?
-oui mais elle n’est pas vraiment te plaire à mon avis : en gros tu es une bonne femme, tu te tapes tout le boulot et on peut te parler mal sans que tu réagisses. Si tu t’avises de t’enfuir, tu te fais harceler par plein de lourds (note que la galette ne tombe jamais sur un animal féminin… ce sont toujours des animaux au masculin qui veulent la manger: le lapin, le loup, l’ours et le renard, jamais une loutre, une biche, une vache, une marmotte…) jusqu’à tomber sur un malin qui t’embrouille en mettant en valeur ta forme physique (que tu es ronde, que tu es blonde…) et tu tombes dans le panneau parce que c’est bien connu que les femmes sont des idiotes…. voilà, tu vois, ça te plaît comme morale?
-Bah non, c’est nul… je peux faire aussi les voix off?
-Volontiers !
Maintenant on est deux à faire les voix off dans la voiture pendant que le petit frère prend plaisir à chanter la chanson de roule galette…