On est des enfants ratés alors…
La violence verbale, je connais, je l’ai subie pendant des années. Mais jamais, au grand jamais, je n’aurai pensé qu’à mon tour j’aurai pu la faire subir à mon entourage et surtout pas à mes enfants. Et pourtant, ce matin, Loulou m’a lâché : On est des enfants ratés alors ???
Comment en est-on arrivés là ?
C’est simple (ou pas) ! Une chose en entraîne une autre qui en entraîne encore une… Et voilà un parent qui perd son contrôle et oublie ce que sont ses principes d’éducation. J’ai haussé le ton en expliquant les motifs de ma colère. Mais je m’y suis mal prise. Très mal. Au point que, sans m’en rendre compte, mes mots se sont transformés en maux.
Depuis quelques temps, nous essayons d’autonomiser les enfants en fonction de leur âge. Nous avons mis au point des petits tableaux illustrés qui reprennent les choses à faire le matin et le soir. Un tableau pour la toilette, un tableau pour les repas…
Au début, cela fonctionnait très bien. Nous leur faisions confiance et l’ambiance était plus sereine le matin et le soir parce que nous n’avions pas à leur répéter :
- tu t’es lavé les dents ?
- tu as changé de caleçon et de chaussettes ?
- tu as sorti ta boîte à goûter ?
- tes affaires sont prêtes pour demain ?
- tous tes cahiers sont signés ?
- etc, etc…
Et puis, ces petits malins ont commencé à « oublier » de changer leurs chaussettes, de faire leur toilette, de laver leurs dents… Alors il a fallu jouer aux contrôleur-contrôleuse et reprendre les vérifications quotidiennes. Forcément, ça ne fait plaisir ni aux enfants, ni aux parents. Mais est-ce qu’on peut décemment laisser partir son enfant à l’école alors qu’il a encore sur le coin des lèvres le chocolat du petit déjeuner, ses cheveux en l’air et l’haleine fétide du matin ? Non. On préfère lui dire plutôt qu’il subisse les moqueries de ses petits camarades de classe.

By Erika
Bis répétita
Cela fait donc plusieurs matins que nous reprenons les enfants en leur faisant remarquer qu’ils n’ont pas fait ceci, pas remis cela à sa place, qu’il faut ajouter un pull au dessus du t.shirt parce qu’il fait encore froid, que 8 h 10 n’est pas l’heure idéale pour s’amuser avec les sabres laser alors que les dents ne sont pas lavées…
Jour après jour, la tension monte. Chez moi tout d’abord parce que j’en ai assez de répéter inlassablement les mêmes choses et de constater que si nous ne sommes pas derrière eux, ils oublient la moitié des choses. Chez eux aussi parce que non, ce n’est pas agréable de nous entendre leur faire remarquer qu’ils ne font pas ce qu’on attend d’eux.
Alors, je ne sais pas si c’est ce qui devait arriver mais c’est arrivé. Ce matin, alors que nous étions déjà en retard et sur le point de partir, Ti’Loulou se rend compte qu’il ne sait pas où est son sac pour la piscine.
Là, je monte tout de suite dans le rouge. La veille, dans le cahier de devoirs, il était indiqué « Prendre les affaires de piscine ». J’avais demandé à Ti’Loulou de vérifier si tout était dans le sac (autonomie = préparer ses affaires ou les vérifier le soir), ce à quoi il m’avait affirmé que oui. Et donc là, ce matin, alors que nous devons quitter la maison, il ne sait pas où est ce sac ???!!! Donc, 1 – il m’a menti, 2 – il n’a pas fait ce que je lui ai demandé, 3 – ses affaires ne sont pas prêtes, 4 – on va être en retard…
J’avoue qu’à ce moment là bien précis, l’éducation bienveillante était loin, bien loin d’être ma préoccupation. Avec du recul et l’analyse de la situation, je sais bien qu’il était de notre devoir de parent de vérifier avec lui ses affaires la veille et surtout, surtout, qu’il m’incombe de CONSERVER MON CALME. Mais je n’ai pas pu…
Et puis soudain…
C’est donc en retard et en colère que nous nous sommes élancés sur le chemin de l’école. C’est alors que Loulou m’interpelle :
- « Pourquoi tu es fâchée Maman ?
- Parce qu’en ce moment, c’est tous les jours pareil. On vous demande de faire des choses, vous ne les faites pas. On a passé du temps à faire des tableaux pour que vous sachiez ce qu’il faut faire sans qu’on soit sur votre dos mais vous ne les suivez pas. On est tout le temps en train de répéter les choses, tous les matins, tous les soirs… Si on ne vérifie pas, les devoirs ne sont pas faits. Vous ne faites pas votre toilette. Vous ne changez pas d’affaires. Vos goûters ne sont pas prêts, vos cahiers pas signés… Vous ne pensez à rien d’autre qu’à vous amuser. On essaie de vous faire confiance mais on ne peut pas !
- On est des enfants ratés alors ????«
J’ai eu l’impression de me prendre un 38 tonnes en pleine face !

Photo pixabay.com
Je me suis arrêtée. Je les ai serrés très fort dans mes bras en leur disant que non, ils n’étaient certainement pas des enfants ratés et que je les aimais plus loin que l’infini et que l’au-delà !
Mes enfants ne sont pas des enfants ratés mais est-ce que mon comportement fait de moi une mère ratée ?
Depuis ce matin, je traîne un énorme boulet de culpabilité qui m’empêche de penser à autre chose qu’à cet instant où mes paroles ont blessé mon fils. J’ai eu envie d’en parler sur mon blog alors même que je sais que cela risque de déchaîner des commentaires sur ce que j’aurai dû dire, ce que j’aurai dû faire. Que certain-e-s vont remuer le couteau sur la violence de mes propos ou sur l’impact que MES MOTS peuvent avoir sur MES ENFANTS.
Je sais tout cela. Mais je sais aussi que je ne suis pas infaillible.
Je sais aussi que ce soir, en les retrouvant, nous échangerons des mots doux. J’aurai besoin de les prendre dans mes bras et de leur dire combien je les aime et combien ils comblent mon cœur de mère au quotidien.
Nous allons aussi organiser notre « Conseil de Famille » pour que chacun-e puisse s’exprimer sur ce qui s’est passé ce matin en essayant de faire comprendre aux autres pourquoi certaines choses sont parties de travers. Tout cela nous aide généralement à trouver ensemble des solutions afin que petits et grands s’y retrouvent dans cette organisation.
Et comme tous les soirs alors qu’ils seront endormis, j’entrerai à pas de louve dans leur chambre pour m’assurer qu’ils dorment paisiblement, remonter la couette sur leurs petits corps tous chauds, les embrasser sur la joue en leur murmurant des mots doux et combien je les aime.
Les mots peuvent blesser mais les mots ont aussi ce pouvoir de guérir les blessures.
Illustration It’s a mum’s life
De tout coeur avec toi, on n’est pas infaillibles et c’est pas facile, mais il faut savoir se pardonner et leur expliquer que des fois ils vont trop loin et que nous aussi, et que ca ne change rien à l’amour… l’autre jour j’ai crié un peu fort sur le mien qui me rendait chevre ( 2h pour mettre un bas de pyjama, apres avoir avalé son repas en rechignant tout du long, chouiné parce qu’il ne trouvait pas le doudou q’il voulait, ralé parce qu’il ne voulait pas se broser les dents, ce genre de soir là) et il m’a dit » tu sais je suis petit moi, QUAND MEME ». Je te dis pas le record sur le compteur de culpabilité maternelle…et oui ce soir là j’ai crié fort pour une pécadille, j’avais surement eu une mauvaise journée, ca arrive. Je me suis excusée, j’ai expliqué calmement tout ce qui m’avait énervée ce soir là, il a promis de faire un effort, j’ai promis de faire un effort, on a fait un gros calin…
Merci pour ton témoignage. C’est exactement ce qui s’est passé chez nous le soir. Explication, trouver ensemble des solutions, gros câlins… Et le lendemain, nickel ! 🙂
Je dirai comme toi, on n’est pas infaillibles, ni parfaites (ah, j’ai dit ça ?!).
Mais là où tu n’as pas failli, c’est dans ta réponse 😉
Moi aussi, j’ai entendu moults reproches -voire insultes- étant enfant et je me suis promis de ne jamais faire subir ça à mes enfants – alors, oui, je m’énerve un peu, beaucoup mais qui ne le fait pas ?
Ma fille m’a déjà dit que je ne l’aimais pas suite à un reproche que je lui faisais … après explications, elle a bien compris qu’il n’en était rien … mais ça fait mal.
Et moi aussi, je suis une dingue qui va les voir en pleine nuit 😉
Mais ils sont tellement mignons quand ils dorment et là au moins, je peux renifler leur odeur sans entendre un « Rhôôô, Maman… » 😉
La culpabilité, ce boulet, qu’on tire au quotidien… Ce qu’on aurait dû, ce qu’on aurait voulu, et qu’on n’a pas fait… mais qu’on fera (ou au moins on essaiera) la prochaine fois parce qu’on apprend tous de nos erreurs, de nos colères, de nos peurs, et c’est aussi grâce à ce boulet qu’on traîne! <3
C’est tellement vrai ! On apprend de nos erreurs et de nos regrets, c’est ce qui nous permet d’avancer et de progresser 🙂
Chaudoudou ma belle
Tu vois moi ce que je trouve sain dans ce que tu racontes c’est qu’il a exprimé ce qu’il ressent, ça montre que vous avez une belle relation que ton moment d’agacement n’altérera pas
Bonjour ,
Mon fils a douze ans et une bonne tête de plus que moi , il me faut donc user, maintenant, d’une autorité franche et plus souple à la fois.
Il m’a confié hier lors d’une conversation somme toute banale qu’il savait profondemment combien je l’aimais même si j’étais parfois » chiante » avec mes exigences ( chuis plutôt du genre carrée ) et que malgre mes remontrances , mes consignes répétées l’aident à se construire et lui donner confiance en lui.
Courage les filles , c’est fatiguant de répéter toujours le même laüs mais la satisfaction de découvrir au fur et à mesure ; la chambre rangée, le sac à dos balançait à sa place et les chaussures manteaux et clés de maison intacts sont une joie indéniable
La couche de bisous, câlins et d’écoute reste essentielle pour nos enfants et ils nous le rendent en grandissant
Ils grandissent, ils arrivent à se gérer de mieux en mieux mais parfois, ça ne se passe pas comme on le voudrait en effet. Je sais que tout cela n’est pas en vain et j’en ai eu la preuve le lendemain matin. Merci pour ce commentaire.
Merci Estamillia. Des bisous Chaudoudou à toi aussi
Je suis très mal placée pour te jeter la pierre. Ici les coups de gueule sont malheureusement fréquents, et je ne vois pas comment inculquer les règles autrement que par la sur-répétition (seule la grande commence à savoir lire), sans forcément pouvoir vérifier la compréhension car la 3ème baragouine plus qu’elle ne parle malgré ses 3 ans, et la 4ème n’a pas 18 mois même si elle court et grimpe partout dès que l’occasion s’en présente.
Bref, y a des moments où c’est quasi-militaire, des moments où ça crie…
Bon, on progresse, mais on est parfois débordé, dépassé.
Et comme dit Estamillia, Loulou a pu t’en parler et rien que ça c’est génial.
PS : rien à voir, mais je voulais dire que j’ai vu l’article par le Huffington Post et pas via Facebook. Un bug ?
Juste mon nom en entier , Marie Degouys. J’aime pas les appellations juste par le nom de famille.
J’avais publié l’article sur ma page Facebook jeudi mais je n’y comprends rien à ces algorithmes qui rendent les publications visibles ou non sur les fils d’actualité. La seule solution que j’ai à te proposer pour recevoir une notification à chaque parution d’un article, c’est de t’abonner au blog ou à la page Facebook.
Je n’ai pas d’enfant mais vous avez visiblement bien géré la situation non ? Vous avez rétablie la vérité en disant que non ils n’étaient pas des ratés….Maintenant cela ne règle pas le problème des choses pas faites… Mais les parents et les enfants parfaits n’existent pas…. Va falloir répéter, rabâcher, s’énerver, rassurer encore et encore….Vous savez c’est aussi valable pour des adultes de devoir se répéter etc…
Continuez, ce que vous dites n’est pas oublié mais gravé dans leur mémoire et plus tard ce seront des réflexes tout comme le merci, svp, bonjour, au revoir et …
🙂
Nous en avons discuté le soir et chacun a reconnu ses « tords ». Le lendemain matin, inutile de répéter quoique ce soit, les enfants se sont préparés sans que j’ai rien à dire. Merci pour votre commentaire bienveillant.
je vis les mêmes matins que toi… depuis des lustres… on passe notre temps à répéter, rabâcher… pas un matin sans cri… enfin disons que c’est rare…
La petite traine et joue au lieu de faire tout le reste… et le grand devient insolent, veut avoir le dernier mot et je sature. Nous avons déjà tenté les discussions… sans succès…
Je ne sais pas quel mot tu as employé… ici c’est du haut niveau de merdasse! comme toi je culpabilise… et puis je demande un truc aux gosses… leur première réponse est un mensonge, suivi d’un haussement d’épaule ou de sourcil… et j’explose… 🙁
Mais comment font-ils dans la famille Ricorée ??? Ah oui, je sais, c’est de la pub 😉
Bonjour, ce billet m’a beaucoup touchée, car je vis la même chose à la maison ! Ce matin encore je me suis fâchée en disant à ma fille « tu ne réfléchis pas avant de parler ou quoi ? » tout ça parce qu’au moment où j’ai donné les tartines aux enfants, celle de Petit boy (17 mois) était coupée en deux et pas celle de la grande (5 ans) et qu’elle m’a dit : « moi j’ai pas de chance j’ai qu’une tartine, lui il en a deux ! ». Alors je me suis rendue compte que je n’avais pas vraiment besoin de me fâcher et de lui dire ça et que j’aurai pu lui expliquer avec gentillesse voir humour qu’ils avaient la même chose en fait… Alors je me suis calmée (un instant aux toilettes) et quand elle s’est mise à regarder ses chaussures sous toutes les coutures alors que nous devions déjà être parti j’ai essayé de ne pas me fâcher encore, et comme chaque matin à l’école, je lui ai fais un gros câlin en lui disant combien je l’aime… tout en pensant aux paroles de ma filles ces derniers jours : « – maman je veux pas que tu appelles la police quand je mens – ah parce que tu mens régulièrement ??! – oui. » …………(non, ne pas m’emporter inutilement………..)
En effet, ce n’est pas évident de toujours garder son calme. L’essentiel est de pouvoir en discuter ensuite avec les enfants mais surtout, de les rassurer. Ce n’est pas parce qu’on se fâche de temps en temps qu’on ne les aime pas. Il faut savoir leur fixer des limites. Ils testent, ils essaient de les repousser et c’est là qu’il faut garder son calme, répéter, répéter… Ils nous font tourner en bourrique mais au fond, qu’est-ce qu’on les aime !
Je trouve un peu gênant cet étalage de culpabilité… quelle mère parle toujours mielleusement à ses enfants ? Aucune, moi non plus d’ailleurs. Est-ce une raison pour s’enfoncer plus bas que terre à chaque mot plus haut qu’un autre ? Pour prendre à témoin tout le net comme si on se mettait soi-même en procès ?
Les enfants ont aussi besoin qu’on les recadre, et ils n’en mourront pas.
Comment éduquer correctement ses enfants si on se sent toujours coupable de tout ce qu’on fait ?
Je vois un peu trop de pathos sur les blogs ou forums de mamans et je finis par trouver ça dérangeant.
On ne sera jamais des mères parfaites, et ce ne serait peut-être pas souhaitable pour nos enfants, d’ailleurs.