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Les violences faites aux femmes et moi

Pour celles et ceux qui me suivent depuis le début, vous connaissez plus ou moins mon histoire. Pour les autres, je mettrai les liens des articles à lire à la fin de celui-ci. Je ne vais pas revenir dessus, j’en ai déjà beaucoup -trop- parlé. Mais aujourd’hui, nous sommes le 25 novembre. Et en cette journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, j’avais envie de vous dire quelques mots sur les violences. Surtout sur cette violence invisible, celle des mots, celle de l’emprise, celle qui détruit. Parce qu’elle est méconnue et que ses effets le sont tout autant.

Ces remarques qui font si mal…

S’il y a bien des choses sur lesquelles j’ai envie de revenir, ce sont ces remarques que j’ai souvent entendues :

  • Mais pourquoi tu n’es pas partie avant ?
  • Oh moi, un mec me ferait ça, je me serais barrée depuis longtemps !
  • Au fond, tu ne devais pas être aussi malheureuse que ça si tu es restée…
  • Ça ne se voyait pas du tout que tu vivais ça !
  • Pourquoi tu ne nous as rien dit ?
  • Ah ça, c’est pas faute de t’avoir dit que ton mec était une pourriture !
  • Mais pourtant, tu es psychologue non ? Comment ça se fait que tu n’aies rien vu ?
  • Non mais ça va, hein, il ne t’a pas frappée non plus !
  • Tu ne crois pas que tu exagères un peu ? Quand on vous voyait, tu n’avais pas l’air malheureux.
  • Ah bon, il a l’air si sympa pourtant ! Tu es sûre que c’est un pervers narcissique ?
  • Je ne comprends pas pourquoi tu en parles encore, c’était il y a longtemps maintenant !

A toutes ces questions, ces remarques, je répondrais une seule chose : l’emprise et le déni.

La difficulté de comprendre 

Je n’en veux à personne, j’ai d’ailleurs moi-même dû prononcer ce genre de phrases un jour. Quand on ne connait pas la violence physique ou psychologique, on ne sait pas comment cela fonctionne. On ne sait pas quel impact cela peut avoir sur une personne. Un impact sur la santé physique mais aussi mentale.

Si toutes ces phrases ont pu me faire mal, c’est parce qu’elles peuvent me laisser sous-entendre que je mens, que j’exagère les choses, que c’est de ma faute. Du coup, je ne suis plus une victime mais une coupable. Coupable de n’avoir rien fait, de n’avoir rien dit, d’être restée. Je suis celle qui, comme tant d’autres, a fermé sa gueule. Je ne suis pas partie, je suis restée, j’ai supporté. Et ça m’a détruite un peu plus chaque jour.

Comment on en arrive à ces situations de violences faites aux femmes ?

Je ne peux que parler de mon expérience. J’ai lu de nombreux témoignages et les histoires sont similaires. Mais je ne parlerai pas pour les autres car finalement, chaque histoire appartient à la personne qui l’a vécue.

En ce qui me concerne, je dirai que cette relation à l’autre a été très compliquée. A la base, il y a une rencontre et de l’amour. Des belles paroles, de la valorisation et cette impression d’être la 8ème merveille du monde. Lui et moi, c’était le bonheur. On s’aimait pour la vie et même si les autres autours trouvaient des choses bizarres, on s’en moquait. Ce qui nous arrivait était si beau et si unique qu’il me disait que les autres en étaient jaloux. Personne ne pouvait comprendre ce que nous vivions. C’était fort, intense, l’amour que je croyais écrire avec un grand A.

Et puis, une fois que la dépendance affective s’est installée, l’emprise a commencé.

Ce sont des moments très déstabilisants parce qu’on ne comprend pas très bien ce qui se passe. Tout d’un coup, il devenait exigeant envers moi, mon physique, ma manière de m’habiller. Il surveillait mes fréquentations et lorsqu’une personne ne lui plaisait pas, faisait tout pour m’en éloigner. Petit à petit, il a fait le vide autour de moi : ma famille, ma meilleure amie, mes partenaires de handball, mes copains et copines de fac… Il m’isolait pour mieux me contrôler, me laver le cerveau. Dès que je commençais à reprendre un peu d’autonomie, il devenait méprisant.

Il avait l’art et la manière de manier les mots pour me briser en quelques phrases. L’art et la manière de retourner les situations contre moi pour me faire culpabiliser et me dire que si tout cela arrivait, c’était de ma faute, uniquement de ma faute.

Vient ensuite le moment de la destruction et de la dévalorisation. Tous ces mots et ces attitudes qui nous font nous sentir moins que rien. Des merdes, voire des sous-merdes.

Le piège se referme. Vous êtes à sa merci. Sa proie. Celle qui pense pouvoir s’évader mais est vite rattrapée à coup de griffes. Vous vous retrouvez à terre, impossible de bouger, incapable de réagir…

Est-ce que j’exagère quand je parle de ça ?

NON ! Même si mes proches n’ont pas forcément compris à quel point tout cela a pu me détruire, je n’exagère pas. Je ne raconte pas ces choses pour qu’on s’apitoie sur mon sort. Ni pour justifier le fait que je sois partie.

Il m’a fallu des années avant de comprendre ce qui s’était passé dans cette relation toxique. Des années à me sentir mal au plus profond de mon être sans comprendre pourquoi.

Pourquoi on reste ?

Parce qu’on est incapable d’agir, de réagir. On se sent complètement vidée, nulle, dans l’incapacité de vivre par nous même. Nous sommes dépendantes de l’autre et persuadées que sans lui, nous ne pouvons pas vivre. Que nous ne valons rien. Nous avons perdu toute confiance en nous.

Et puis, quand le vide a été fait autours de vous, sincèrement, vous ne savez pas vers qui vous tourner. Où aller ? Comment trouver la force de faire ses valises ?

A chaque fois que j’ai voulu partir, il a usé de sa stratégie habituelle : la culpabilité. Si je partais, je foutais sa vie en l’air et celle de sa famille qui avait tant fait pour moi. Je ne réussirai à rien car il avait toujours tout fait pour moi. Alors je ne pouvais pas partir. Le pire dans tout ça ? Après chaque tentative, je lui trouvais des excuses et j’espérais qu’il changerait. Parce qu’il me l’avait dit, une fois encore, une fois de plus…

Pourquoi on n’en parle pas ?

Parce qu’on vit dans le déni. On pense que ce n’est pas possible qu’il nous fasse ça à nous. Il nous aime et on l’aime. Et puis, il peut changer parce qu’on s’aime si fort tous les deux…

Et encore une fois, en parler à qui ? A nos proches qui vont eux aussi se sentir démunis et ne pas savoir vers qui nous orienter ? Et puis, comment expliquer ce qui se passe quand nous-même nous n’en avons pas conscience ? Quand nous sommes soumis au jugement des autres ?

Il existe des associations spécialisées pour l’accueil et l’écoute des femmes victimes de violences. Mais quand on n’est pas confrontée à la situation, on ne les connait pas. On ne retient pas les numéros. Alors notez-les, une bonne fois pour toutes !

Pourquoi ça fait mal alors que ce ne sont pas des coups ?

Parce que cette violence psychologique détruit toute estime de soi.

Imaginez que vous entendez à longueur de temps que vous êtes nulle, que tout ce que vous faites est nul. Que vous êtes incapable de vous débrouiller toute seule et que vous ne valez rien. Vous finissez par l’intégrer, comme un enfant à qui on répète qu’il est méchant et finit par le croire.

Alors petit à petit, vous perdez toute estime de vous même. Vous pensez en effet que vous ne valez rien. Que vous avez tel ou tel défaut… Merde ou sous-merde rappelez-vous…

Et que pour se reconstruire après des années sous emprise, c’est long, très long…

Des films pour comprendre les violences faites aux femmes

J’avais déjà parlé de ces vidéos « Fred et Marie » alors je les partage à nouveau. Elles sont très bien réalisées et permettent bien de comprendre les mécanismes qui entrent en jeu.

L’importance de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes

Une journée ne suffit pas, comme toutes les journées de lutte.

Les violences faites aux femmes sont des préoccupations quotidiennes pour certaines associations.

Cette journée est donc l’occasion de rappeler que des actions sont mises en place toute l’année et pas seulement le 25 novembre.

Le 25 novembre permet aussi de rappeler ces chiffres qui font froid dans le dos : une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint ! Mais je ne sais pas combien meurent des suites de violences psychologiques…

Illustration Mademoiselle Maman

En cette journée de lutte contre les violences faites aux femmes, je voulais juste apporter quelques explications.

Dire que ce n’est pas facile pour l’entourage de comprendre pourquoi elles ne partent pas. Essayer de faire comprendre ce qui se passe pour ces femmes au travers de mon vécu.

Vous dire aussi que vous pouvez faire quelque chose, même si vous avez l’impression que cette femme ne vous entend pas. Ne lui tournez pas le dos, jamais… Et ne remettez pas en cause son témoignage. Dites lui que vous entendez et que vous comprenez. Donnez-lui le numéro d’une association, un prospectus, un lien vers un site internet. Je vous assure que vous lui viendrez en aide de cette manière. L’idée fera son chemin, cela prendra peut-être du temps, mais vous pouvez agir pour l’aider.

C’est mon histoire… 

Égalimère

Working-mum, pro de l'équilibre vie pro-vie perso, qui culpabilise, râle contre les stéréotypes & les inégalités, aime la vie, les sorties et les voyages.

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