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Fausse couche, quand l’écoute et l’empathie font défaut

Cela fait longtemps que je voulais aborder le sujet de la fausse couche mais mon premier article est resté à l’état de brouillon. Même si cela remonte à plus de 10 ans, je trouvais ça encore trop personnel de parler de ma fausse couche. Et pourtant, j’en avais des choses à dire. Entre la manière dont elle s’est éternisée entre l’annonce, la prise d’un médicament, un examen, une échographie pour finir par une hospitalisation et un curetage… Plus d’un mois 1/2 à vivre « dans » la fausse couche et la furieuse envie d’en finir avec ça, de passer à autre chose, de penser à autre chose. Vous parler de l’incompréhension, de la culpabilité, de cette absence totale d’écoute et de soutien. Dire que tout cela laisse des traces et qu’il ne faut pas négliger le mal que ça fait.

Et puis, il y a quelques jours, j’ai lu ce témoignage très touchant de Paris Pages Blog. Quasiment en même temps, je recevais un message privé d’une lectrice m’annonçant sa fausse couche. Elle me demandait si je comptais aborder le sujet un jour alors voilà, ce jour est arrivé. Parce que non, vivre une fausse couche, contrairement à ce que de nombreuses personnes pensent encore, ça n’est pas « rien »…

Illustration Mademoiselle Maman

La fausse couche est avant tout une histoire personnelle

Il me semble qu’aucune femme ne vivra sa fausse couche de la même manière qu’une autre. Certaines ne savent pas qu’elles en font une et l’apprennent en allant consulter pour des symptômes inhabituels. D’autres s’effondrent après l’annonce de la mauvaise nouvelle. Il y a celles qui vont serrer les dents et ne rien dire. Et puis, il y a celles qui vont pleurer toutes les larmes de leur corps avec ce besoin d’en parler, d’évacuer la douleur de la perte.

Chaque histoire est différente en fonction de l’avancement de la grossesse, des conditions de cette dernière, de l’âge de la femme… Si cette grossesse a été attendue pendant longtemps ou non. Mais également des conditions dans lesquelles se déroule la fausse couche : fausse couche spontanée, fausse couche médicamenteuse, curetage et parfois un combo médicament suivi d’un curetage. Malgré tout, s’il y a bien une chose qui me semble commune à toutes ces femmes, c’est le besoin d’en parler pour ne pas rester seule avec leur peine ou leur douleur.

Bougies - deuil - fausse couche - attentats - Egalimère

 

La fausse couche vécue par l’entourage

Il y a fort, fort longtemps, dans cette vie que j’envisageais sans enfant, je ne connaissais rien de la fausse couche. Un jour, un proche m’envoie un texto en m’indiquant que sa femme vient de perdre leur bébé. J’étais au travail, j’ai dû répondre quelque chose comme « Oh, désolée, gros bisous » et je suis passée à autre chose. Pour moi, il ne s’agissait pas encore d’un bébé puisqu’elle était au début de sa grossesse. Elle avait fait une fausse couche et puis voilà, point à la ligne, la vie continue. Enfin, la mienne, avec mon travail, mes loisirs, mes ami.e.s… Je ne me suis pas plus que ça préoccupée de savoir comment allait sa femme et la manière dont elle vivait la situation.

A cette époque, je n’aurais pas compris pourquoi elle pleurait tant. Pourquoi elle se sentait vide de l’intérieur. J’étais loin de m’imaginer toutes les questions qu’elle pouvait se poser et de la culpabilité qui l’envahissait. Je ne me doutais pas qu’elle chercherait une explication à cette fin de grossesse soudaine. Elle avait sans doute besoin d’en parler mais je ne n’étais pas là. Je ne lui ai pas tourné le dos parce que sa peine me faisait peur, non, je ne savais pas ce qu’elle vivait.

Comme beaucoup d’autres femmes, elle a dû entendre :

  • Allez, ce n’est pas si grave, la vie continue
  • Au moins, tu sais que ça marche et que tu peux avoir des enfants
  • Dans quelques mois, tu n’y penseras plus
  • Tu es encore jeune, tu as le temps d’en avoir d’autres
  • Ne t’inquiètes pas, d’ici peu, tu nous annonceras ta nouvelle grossesse 
  • Mais pourquoi est-ce que tu te mets dans un état pareil, ce n’était que le début de ta grossesse
  • Il vaut mieux maintenant que dans quelques mois
  • La nature est bien faite, si tu l’as perdu, c’est qu’il y avait une bonne raison

Parfois, l’entourage se veut rassurant mais ces mots font mal. Ils remuent le couteau dans la plaie et donnent l’impression de nier ce qui vient de se passer. Parce que, pour celle qui vient de la vivre, la fausse couche est une terrible épreuve.

Pourquoi la fausse couche fait-elle si mal ?

Comme je le disais plus haut, la douleur de la fausse couche est variable en fonction des femmes, de leur histoire. Mais il ne faut pas nier cette douleur, quelque soit le nombre de jours ou de semaines de grossesse. Que la fausse couche se produise à 4 semaines de grossesse ou à 12 semaines, elle marque, elle laisse des traces.

Certaines femmes se projettent très rapidement dans leur grossesse et leur maternité future. Dès les premiers jours, elles s’imaginent avec leur ventre s’arrondissant, attendre un bébé, l’accueillir… Elles choisissent déjà des prénoms, pensent à la décoration de la chambre, sourient devant les vêtements de bébés. Et puis, d’un coup, tous ces rêves se brisent à l’annonce, souvent brutale, de la fausse couche.

Quand on apprend qu’on vient de faire une fausse couche, plusieurs types de réactions peuvent survenir : chagrin, colère, déni, culpabilité, incompréhension. On cherche à savoir pourquoi. Qu’est-ce qui s’est passé pour que notre grossesse ne se poursuive pas. On culpabilise (et oui, encore une fois) en se demandant si ce qu’on a mangé était bien recommandé, si on n’aurait pas mieux fait de s’abstenir de faire du sport, de prendre les transports en commun…

Vient ensuite le moment où il faut évacuer ce petit bout de nous qui n’est plus. Parfois, cela se fait naturellement. Parfois, il faut prendre un médicament. D’autres fois, les femmes doivent avoir recours au curetage. Peu importe le moyen, il signe l’arrêt de l’espoir que tout cela ne soit pas réellement vrai et qu’il pourrait y avoir un petit doute. Non, voilà, c’est fini.

anonymat - bulle - coucher de soleil
Crédit Photo : @Nana Cam Photo

Faire face au manque d’écoute

Ce qui revient souvent dans les témoignages sur les fausses couches, c’est le manque d’écoute et d’empathie.

Je me souviens très bien des conditions dans lesquelles nous avions été accueillis, mon mari et moi, lorsque j’ai consulté les urgences. Nous trouvions que l’attente était interminable alors même que nous étions plein de doutes et dans la crainte de la fausse couche. A l’accueil, une personne nous a dit « De toutes façons, si c’est une fausse couche, ça ne changera rien, il n’y a plus rien à faire… ». Je n’avais pas encore été examinée… Puis le médecin nous a reçu, il m’a installée sur la table d’examen, pieds dans les étriers, écho vaginale et là, sans aucune empathie, il nous a indiqué : « il n’y a rien, aucune activité, vous pouvez vous rhabiller ». Nous n’avons pas eu le temps de poser nos questions que je repartais avec une ordonnance pour du Cytotec pour évacuer « tout ça ».

Le personnel soignant

Il doit avoir l’habitude de recevoir des femmes qui viennent pour des fausses couches. Pour les médecins, c’est sans doute un acte banal mais pour elles, non. C’est le moment où elles vont apprendre que leur grossesse ne va pas continuer. C’est donc un moment délicat où un minimum d’empathie devrait être de rigueur. Prendre le temps d’écouter la patiente, d’essayer de lui expliquer ce qui se passe, la suite du parcours. Et de lui dire qu’elle n’a rien à se reprocher, qu’elle n’est pas responsable de cette fausse couche. Quelques petits mots qui peuvent déjà soulager.

L’entourage

Nos proches ne sont généralement pas prêts pour affronter ce genre de situation. Un deuil, une maladie, une fausse couche, mettent souvent les autres très mal à l’aise, ne sachant pas comment réagir ni quoi dire. Il n’y a pas de parole miracle pour soulager la peine mais parfois, une main qui se pose sur une épaule, des bras qui vous entourent, ça fait du bien. Pas besoin de parler si on ne sait pas quoi dire mais montrer qu’on est là, qu’on accueille la peine et la douleur, c’est déjà ça.

Respect de l'autre
Auteur-e non identifié

Où trouver de l’aide quand on a envie ou besoin de parler de sa fausse couche ?

Il ne faut pas hésiter à parler de sa fausse couche si vous en ressentez l’envie ou le besoin. Il ne faut pas perdre de vue que vous allez vivre toutes les étapes d’un deuil : choc, déni, colère, tristesse, acceptation. En fonction de votre état émotionnel, vous pourrez trouver différentes personnes pour vous écouter et vous soutenir.

Auprès de son conjoint ou sa conjointe :

Même si la situation peut être difficile pour la personne qui partage votre vie, c’est une épreuve que vous avez vécue ensemble. L’un.e et l’autre pouvez ressentir le besoin d’en parler. D’autres personnes préféreront en parler ailleurs que dans leur sphère très intime.

Dans notre entourage :

Il y a sans doute une personne qui a vécu la même situation. Elle sait par quoi vous êtes passée et peut comprendre votre peine et votre douleur.

Auprès des professionnel.le.s :

Faire le deuil de sa grossesse peut prendre du temps. En cas de besoin, il ne faut pas hésiter à se faire aider par un.e psychologue, un.e sophrologue, tout.e professionnel.le dont l’écoute et l’empathie sont le cœur de métier.

Sur des forums internet :

Je les ai découvert après ma fausse couche. J’ai intégré un groupe sur auféminin.com et j’ai pu en parler avec d’autres femmes qui venaient de vivre la même chose. Ensemble, nous avons surmonté cette épreuve. Certaines sont rapidement tombées enceintes, d’autres non. Nous pouvions dire que nous étions jalouses de notre voisine qui affichait son ventre rond, que nous nous sentions comme des monstres quand on n’arrivait pas à se réjouir de la grossesse d’une amie… C’est bien plus qu’un moment de deuil que nous avons partagé puisqu’avec certaines, de vrais liens d’amitié se sont créés.

Auprès d’associations

C’est Cécile du blog Paris Page Blog qui m’a parlé de cette association : AGAPA

Cette association propose accueil, écoute et soutien aux personnes en souffrance à la suite de la mort d’un bébé autour de la naissance ou d’une grossesse qui n’a pu être menée à terme quelle qu’en soit la raison : fausse couche, mort fœtale in utero, grossesse extra-utérine, interruption médicale de grossesse, IVG, réduction embryonnaire.

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https://www.marieclaire.fr/fausse-couche-symptomes-traitement-suivi-psychologique,1280795.asp

Égalimère

Working-mum, pro de l'équilibre vie pro-vie perso, qui culpabilise, râle contre les stéréotypes & les inégalités, aime la vie, les sorties et les voyages.

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