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Quel est le problème avec le rose et le bleu ?

Il y a quelques jours, j’ai partagé cette photo sur les réseaux sociaux. Elle était accompagnée du commentaire « Il pique un peu le catalogue Conforama non ? En plus, les filles n’ont pas de bureau pour réviser… ». Cette publication a été partagée plus de 150 fois. Des personnes trouvaient que cette image véhiculait des stéréotypes de sexe comme moi. Mais d’autres n’avaient pas la même vision et me demandaient quel était le problème avec le rose et le bleu. Pour tout vous dire, je n’ai aucun problème avec le rose et le bleu. Non, aucun.  En revanche, j’ai bel et bien un problème avec les images et les idées véhiculées autour de ces couleurs.

quel est le problème avec le rose et le bleu - catalogue-conforama-nov-2016-Egalimère

Quel est le problème avec le rose et le bleu alors ?

Imaginez-vous un instant que toutes les couleurs soit attribuées à une catégorie, qu’elle soit professionnelle ou physique. Imaginons maintenant que vous avez envie de repeindre votre intérieur. Vous aimez bien le vert et vous vous dites que cette couleur serait parfaite pour votre salon. Enthousiasme, vous en parlez à votre entourage attendant son approbation. Mais on vous répond à plusieurs reprises : « Ah mais non, tu ne peux pas, le vert, c’est pour les jardinier.e.s !!! »

Ridicule ?

Tout autant que « Le rose c’est pour les filles… »

le rose c'est pour les filles - let toys be toys
#InternationalMensDay campagne de Let toys be toys

Voilà donc ce qui me gêne dans ces couleurs : qu’elles soient attribuées à un genre. Mais cela va encore plus loin puisque des rôles sociaux et des caractéristiques personnelles y sont associées dès la petite enfance par le biais des jouets notamment. A relire à ce propos : lutter contre les stéréotypes 

Les jouets dits « pour filles » et les jouets dits « pour garçons ».

Au départ, rien ne pousse les filles à aimer le rose et les garçons à préférer le bleu. Non, dans nos cerveaux, il n’existe pas de zone distincte qui appuierait une théorie selon laquelle les filles sont programmées génétiquement pour aimer le rose et les garçons le bleu. Je vous invite à regarder les conférences de Catherine Vidal sur le cerveau. Il y en a plusieurs sur Youtube.

Au fait, saviez-vous qu’au moyen-âge, les filles étaient habillées en bleu (couleur de la Vierge Marie) et les garçons en rose qui était considéré comme une couleur virile (regardez les bas des chevaliers médiévaux) ???

Alors pourquoi alors, les enfants s’orientent vers ces couleurs ?

Il y a quelques années, dans les magasins ou les revues, les jouets n’étaient pas genrés. Aujourd’hui, dans les magasins, les jouets sont classés en catégories « filles » avec une signalétique rose ou « garçons » avec une signalétique bleue. Et qu’est-ce qu’on trouve dans le rayon « filles » ? Des poussettes, des aspirateurs, des cuisinières, des produits et accessoires de beauté, des poupées, des machines à laver…

 

le problème avec le rose et le bleu
Une page de catalogue Argos de 1976 juxtaposée avec les mêmes types de jouets vendus par Argos aujourd’hui – Source : Let toys be toys

Quelle est donc l’image véhiculée pour les petites filles ? Qu’on attend d’elles qu’elles s’occupent des enfants et prennent soin des autres, qu’elles préparent à manger et entretiennent leur maison. Mais aussi, qu’elles soignent leur apparence en se maquillant et portant des accessoires…

Qu’est-ce qui se passe chez les petits garçons ? Ils pensent tout simplement que ce qui est dans le rayon « filles » est pour les filles et qu’ils n’ont pas la possibilité de jouer avec.

Et qu’est-ce qu’on trouve au rayon « garçons » ? Des voitures, des coffrets de petits scientifiques, des boîtes à outils, différents jeux d’action et de découverte. Et comme c’est au rayon « garçons » les filles pensent que ce n’est pas pour elles…

Dans son étude « Trente ans de catalogues de jouets », Mona ZEGAI conclue : « 

« Tous ces éléments agissent comme autant d’injonctions à respecter des identités et rôles sexués définis du dehors et fortement stéréotypés, les jouets apparaissant alors comme un outil permettant cet apprentissage. Les injonctions sont compréhensibles de plus en plus tôt par le biais de codes de différenciation des sexes accessibles aux plus jeunes et qui seront la plupart du temps corroborés par d’autres instances de socialisation ; nul besoin de savoir lire pour pouvoir décoder le message transmis par les couleurs et photographies, et ainsi être soumis à sa contrainte, autrement dit savoir quels jouets, objets, activités sociales sont  prescrites et lesquels sont proscrits

Et si on laissait l’enfant choisir ?

Dès leur plus jeune âge, les enfants subissent l’influence des parents, de la société, du marketing, de la publicité, de l’école… Et donc, il est déjà fortement ancré dans leurs esprits que le rose est pour les filles et le bleu pour les garçons.

Par ailleurs, nous mêmes, les adultes, avons tendance à reproduire ces visions stéréotypées des jouets. Qu’une petite fille veuille un établi de bricolage passe encore. Mais qu’un garçon veuille une poupée et une poussette rose n’est pas encore très bien accepté par tout le monde. Pourquoi ? Parce que le rose est associé aux activités dites pour les filles. Même si de plus en plus de père s’impliquent dans la vie familiale, ce n’est pas la poussette qui est en question mais sa couleur.

Ainsi, il ne faut pas s’étonner que les filles continuent à se diriger vers les rayons « filles » et les garçons vers les rayons « garçons ».

En revanche, dans les magasins qui ne proposent pas de différenciation genrée des jouets mais un classement par thématique, un jouet reprend sa fonction initiale : celle d’un jouet !

Qu’est-ce qui m’a dérangée dans le catalogue Conforama ?

Même si cela n’est pas indiqué « fille » ou « garçon » sur les images, nous sommes tellement formaté.e.s que nous associons la chambre rose aux filles et la bleue aux garçons. Enfin, pardon, peut-être que je véhicule moi-même des stéréotypes comme me l’ont fait remarquer certaines personnes sur Twitter :

commentaires twitter sur stéréotypes rose et bleu - Egalimère
Extraits des commentaires reçus sur Twitter

Vous aussi ça vous fait sourire 😉 … Bref, je continue avec ce qui me dérange sur cette page. Je précise que la chambre rose peut être équipée d’un bureau et que les autres pages du catalogue proposent des chambres sur des nuances de gris/blanc. Donc tout le catalogue n’est pas incriminé, juste cette double page.

Dans la chambre rose : un décor de princesse, une coiffeuse, une bibliothèque avec des livres.

L’image que cela véhicule est qu’une fille peut rester dans sa chambre à se regarder dans le miroir et prendre soin de son apparence physique. Pour s’occuper, elle pourra se consacrer à la lecture et ainsi, rester bien sagement dans sa chambre puisque cela correspond au rôle social qui lui est attribué.

Comme l’indique si bien Une femme et des livres en commentaire du présent article, la lecture permet également de découvrir le monde et s’évader. En disant que les filles restent dans leur chambre, je voulais faire allusion à la sous-représentation des femmes dans l’espace public.

Article Le monde (cliquez sur l'image)
Illustration Colcanopa extraite d’un article paru dans Le monde (cliquez sur l’image)

Dans la chambre bleue : un décor de voiture, un bureau, mais pas de livres.

Les petits garçons ont donc un bureau pour réviser et devenir performant à l’école pour avoir un bon métier et bien gagner leur vie. Une fois qu’ils ont fini de jouer, ils ne restent pas dans la chambre pour lire mais vont sortir, explorer le monde, jouer à l’extérieur.

Le début des inégalités !

Et voilà comment se construisent les débuts des inégalités filles-garçons. En indiquant aux filles et aux garçons, avec ces codes couleurs et ces signalétiques, que des choses leur sont attribuées et d’autres non.

C’est ce qu’on appelle les stéréotypes de sexe. Ci-dessous, vous trouverez le lien vers un article du collectif Marre du Rose qui explique davantage ceci. Mon article est déjà assez long et le leur très bien rédigé et explicite.

Encore une fois, ce n’est pas la couleur qui me dérange mais la signification qu’elle revêt et les stéréotypes  qu’elles véhiculent.

Alors oui, rien ne nous empêche, à nous adultes, d’aller à l’encontre de ces rôles sociaux et de ce marketing genré. Laissons l’opportunité aux petits garçons de pouponner et aux petites filles de bricoler. Apprenons leur que le rose ou le bleu ne sont que des couleurs et qu’elles ne sont pas réservées aux petites filles ou aux petits garçons mais bien à tout le monde.

Pour aller plus loin :

Égalimère

Working-mum, pro de l'équilibre vie pro-vie perso, qui culpabilise, râle contre les stéréotypes & les inégalités, aime la vie, les sorties et les voyages.

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